Equipe opérationnelle : Dr Nadine TRAVERS neurochirurgien, Dr Laure MARTIN anesthésiste réanimateur pédiatrique, Nathalie DOUARD infirmière de bloc opératoire, Sandra De ARAUJO puéricultrice.
L’hôpital Central de Yaoundé est un établissement public, situé en centre ville. Il emploie près de 600 personnes, dont 70 médecins (pour la plupart spécialistes) et constitue avec l’hôpital Général et le CHU les trois grands centres hospitaliers de la ville. Sa capacité d’accueil est de 300 lits. Toutes les spécialités y sont représentées (médicales, chirurgicales, obstétricales, psychiatriques, biologiques, radiologiques).
Le déroulement de la mission
Le premier jour est consacré à la visite de l’hôpital et du bloc opératoire qui comprend 5 salles d’opération et une salle de réveil. Il regroupe les spécialités de neurochirurgie adulte et enfant. L’accueil est chaleureux de toute part. Lors de la visite, nous faisons la connaissance de deux enfants prévus au programme opératoire les jours suivants. Le lendemain, la première intervention concerne Martial, 19 mois, porteur d’une importante myéloméningocèle lombosacrée partiellement épidermisée, compliquée d’une hydrocéphalie décompensée : importante macrocrânie avec coucher de soleil permanent. La pose d’une dérivation ventriculopéritonéale est indiquée. Les conditions anesthésiques sont difficiles du fait de l’absence de matériel et malgré l’apport de notre « valise humanitaire ». Serge, l’anesthésiste, est très présent, intéressé et d’un grand secours pour trouver le matériel manquant. La pose de la dérivation est associée à la cure d’une hernie inguinale bilatérale majeure par le chirurgien viscéral. Le passage en réanimation pour la période post-opératoire s’impose car l’intervention viscérale a été longue et hémorragique ; l’enfant aura besoin d’oxygène puis d’une transfusion.
Les jours suivants, Paulin, ancien grand prématuré (né à 6 mois de grossesse), âgé maintenant de 3 mois, pesant 3 kg, est opéré. Il souffre d’une hydrocéphalie majeure probablement secondaire à une hémorragie ventriculaire (scanner de l’hôpital en panne. L’intervention (pose d’une dérivation ventriculopéritonéale) se passe bien et Paulin est déjà transformé le lendemain de l’intervention. Martial va mieux au 2ème jour post-opératoire et peut être sevré de l’oxygène. On retrouve un contact oculaire franc chez Paulin, ce qui satisfait tout le monde.
En fin de séjour, le directeur nous reçoit courtoisement pour connaître nos impressions et nous livre sa vision d’avenir. Nous établissons ensemble des priorités, à commencer par la participation incontournable d’un technicien ou ingénieur biomédical pour les futures missions, afin de débuter une stratégie de maintenance du matériel chirurgical et anesthésique existant (notamment étudier le potentiel encore exploitable des vieux respirateurs). Créer une collaboration entre TEO2004 et les techniciens locaux lors des missions et avoir recours à des avis par mail entre les missions est un de ses souhaits. Il nous exprime ses vœux de collaboration active.
L’enseignement
Une après-midi est consacrée aux cours : Laure MARTIN aborde l’anesthésie caudale et l’anesthésie ambulatoire avec les médecins et infirmières anesthésistes. Ils sont très intéressés, posent beaucoup de questions. Les médecins anesthésistes ont, pour la plupart, fait des stages en Europe et connaissent les hôpitaux parisiens et belges. Nadine TRAVERS expose la prise en charge des craniosténoses avec les neurochirurgiens (internes et séniors) avec lesquels les échanges sont riches.
Les conditions de travail
Nous avons constaté un manque important de matériel anesthésique : pas de protoxyde d’azote, pas d’air, uniquement de l’oxygène au niveau du poste d’anesthésie, aspiration défectueuse et respirateur en panne. Les médecins et les infirmières anesthésistes travaillent donc dans des conditions très difficiles. Par conséquent, la chirurgie et la neurochirurgie se font dans de mauvaises conditions. La neurochirurgie nécessitant une narcose profonde et une ventilation parfaite pour éviter la poussée cérébrale per-opératoire.
Au niveau chirurgical, le manque de matériel est net. Il n’existe plus de moteur crânien, plus de microscope ni de matériel de microchirurgie. L’aspiration, unique pour 4 salles, est régulièrement attribuée au chirurgien qui sera le plus en difficulté sans elle, ce qui suppose des suppressions inopinées. De plus, le matériel chirurgical de base, disponible, n’est pas adapté à la pédiatrie. L’eau courante n’est pas toujours présente sur l’hôpital, engendrant des problèmes de désinfection des mains opératoires et des problèmes de lavage et de stérilisation des instruments. Le manque d’anesthésie profonde occasionne d’importantes déperditions sanguines et une poussée cérébrale, limitant les possibilités de dissection dans de bonnes conditions. Il n’existe pas de neuro-endoscope qui permettrait de traiter bon nombre d’hydrocéphalies sans les voir exposées à un dysfonctionnement de valve ultérieur.
Les perspectives
Il paraît fondamental d’améliorer l’équipement, en particulier respiratoire, avec au moins un respirateur pédiatrique en état de marche, les fluides (N20, air en plus de l’O2) et les halogènes nécessaires. Un cardioscope serait également bien utile. Les moyens humains sont là et motivés mais ils subissent les conditions. Pour le post-opératoire, la réanimation demanderait à être un peu plus équipée : scopes fonctionnels et drogues disponibles pour assurer une neurosédation si nécessaire.
Au niveau chirurgical, il est nécessaire d’acquérir un moteur crânien et de réparer le microscope opératoire dans un premier temps.